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Anne Marie KOTTO

by EDC
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« La recherche de l’emploi est un emploi à plein temps »

Selon la chargée d’études au FNE à Douala, les chercheurs de l’emploi ne doivent jamais se laisser, tant qu’ils n’ont pas eu gain de cause.

De la semaine emploi jeune aux journées portes ouvertes à la fête à l’emploi. C’est quoi la différence ?

Il y  a de cela quelque années pendant la fête de la jeunesse nous avions ce que nous appelions une semaine emploi jeune. Nous accompagnions les jeunes à la recherche d’emploi, nous faisions des campagnes, des carrefours métiers afin de les aider dans leur orientation professionnelle. Il y avait des chefs d’entreprise qui intervenaient, il y avait des stands qu’on animait et tous les chercheurs d’emploi y participaient.  Seulement au fil du temps on s’est dit que ça devenait vulgaire. De nombreux acteurs voulaient faire la semaine emploi jeunes, les placements jeunes. Et vous savez, pendant la semaine de la jeunesse, les jeunes sont en effervescence et distraits. Pour eux ça devient comme un jeu. Nous nous sommes dits, nous sommes dans le domaine de l’emploi, pourquoi ne pas plutôt fêter l’emploi ? C’est dans cette optique que notre directeur général a eu la nouvelle vision, de faire des journées découvertes emploi, en somme la découverte du FNE, ouvrir les portes au public et y découvrir tout ce qu’on y fait. On y ajouté les offres d’emploi afin d’éviter un gout d’inachevé, c’est ainsi que la bourse de l’emploi a été instaurée, du moins la mini bourse de l’emploi. Des employeurs viennent en direct et on recrute directement, on les met en situation d’entretien d’embauche.

Cela veut dire que vous travaillez de manière collégiale avec quelques entreprises pour le recrutement de potentiels candidats ?

Non, ce n’est pas que nous travaillons avec quelques entreprises. Le Fonds national de l’emploi travaille avec toutes les entreprises. Sinon où allons-nous insérer les gens qui s’appuient sur nous ? Nous ne sommes rien sans l’entreprise et nous travaillons avec toutes ces grandes entreprises.

Travailler avec toutes les entreprises c’est intéressant. Mais lorsqu’on échange avec certain jeunes, ils reprennent comme une antienne une idée répandue, c’est que lorsqu’il y a une demande de candidats dans une entreprise à la notoriété établie, les agents du FNE privilégieraient les proches de leurs familles…

C’est une très bonne question que vous me posez-là. Nous avons les documents concrets, lorsque nous avons une demande d’emploi au FNE, pour un poste, nous pouvons présenter au minimum cinq candidatures. Nous n’envoyons jamais un seul CV. Je vous prends un cas. Si ENEO me demande un cadre, je ne vais pas envoyer une seule candidature. Je vais envoyer cinq candidatures au minimum. Nous avons eu un grand vendeur de la place qui nous a passé une offre de 25 agents d’accueil, des jeunes à former en banque et progressivement en faire des chargés de clientèles. A priori il voulait des diplômés de filière de banque. Nous leur avons présenté 80 candidatures. Et c’est même parce que c’était urgent car pour 25 postes on pouvait présenter même 150 candidatures  parce que pour un poste, il doit y avoir au moins trois candidats. Ils ont passé l’offre un lundi, ils voulaient les candidats le mercredi suivant. Nous avons un problème avec les jeunes inscrits au FNE. Ils changent fréquemment leur numéro de téléphone. Tous les jours. Souvent donc lorsqu’il y a une offre urgente, les avoir au téléphone n’est pas facile. On ne saurait faire de discriminions. On prend la peine de les former pour ne pas avoir honte en entreprise que toutes les questions qu’on aura à leur poser lors de l’entretien d’embauche leur échappent, cela ferait une mauvaise image au FNE. Car il y en a qui viennent en teeshirt  pour montrer leur pauvreté. L’employeur n’a pas besoins de tout cela, il veut juste un employé compétent, prêt à l’emploi. Il n’est pas là pour savoir si vous n’avez pas mangé hier, si votre mère est décédée hier…

On déplore le niveau d’expression des jeunes. Cela semble négativement jouer sur leur embauche au bout du compte…

Je suis une ancienne gestionnaire des ressources humaines, pendant longtemps j’ai occupé ce poste. Lorsque nous recevions les demandes d’emploi et que vous avez l’expression de quelqu’un qui a un master, vous étiez abasourdi du nombre de fautes sur une petite demande d’emploi. J’avais un jour reçu la demande d’emploi de quelqu’un qui était sorti d’une école sérieuse. Sa demande sur la forme était bonne, elle accrochait. Mais à partir du nombre de fautes qu’il y avait sur sa demande, nous avons été obligés de ne pas le retenir. Nous nous posions mille et une questions sur la manière dont il a pu obtenir ses diplômes. Si on a autant de faute sur sa demande d’emploi, pourra-t-on demain faire un rapport ? Un cadre a priori ! C’est des rapports, il doit pouvoir tenir les réunions etc.

Vous arrive-t-il souvent de faire des descentes dans les établissements et autres universités pour faire ces remarques ?

Oui, nous avons déjà un programme que nous appelons OPS, c’est le programme d’orientation en milieu scolaire où nous travaillons davantage avec les élèves et leurs conseillers d’orientation afin que les élèves sachent qu’ils doivent se former par rapport à une filière précise. On a des ambitions, des aspirations, il faut les transformer en métier. Tant qu’on reste élève il faut avoir une visée. Le constat malheureusement est que vous trouvez des gens avec ‘’bacc+4’’ qui tergiversent encore. C’es toutes ces informations que nous donnons au FNE, des stratégies pour chercher l’emploi, comment rédiger la demande, quelle attitude pendant l’entretien d’embauche etc. car c’est un traitement technique qui doit se faire, savoir se vendre.

Qu’est-ce qu’on met dans cette vente ?

Quel est votre savoir-faire, les écoles fréquentées. Vous conviendrez avec moi que quelqu’un qui a échoué le baccalauréat pendant cinq fois et celui qui a le baccalauréat d’un coup et avec la mention très bien n’ont pas les mêmes chances. Si donc vous été major, n’hésitez pas à le mettre en avant. Bien se vendre c’est aussi bien s’habiller. Quand vous entrez dans une entreprise, votre allure joue beaucoup. Il y a des gens qu’on recrute juste parce qu’ils ont été vus. Cela veut dire qu’il faut soigner l’image, qui fait partie des critères de choix d’un recruteur. Vous voyez dans les grilles de notation, la présentation est le premier critère, elle a le même nombre de points que parc exemple votre façon de présenter vos compétences, d’ailleurs, elle a le même nombre de points. 

Et la main d’écriture ?

Ça dépend du métier. Aujourd’hui on écrit de moins en moins. La main d’écriture, si vous êtes calligraphe peut vous aider, ça dépend de ce qu’on veut faire de vous certes, il y en qui lisent la personnalité à travers la main d’écriture. Mais ce n’est pas suffisant.

Que dire aux jeunes qui restent convaincus pour réussir dans la société camerounaise, il faut un réseau ?

Pas forcément. Le réseau peut aider. L’exemple d’un monsieur que nous avons reçu. Un chercheur d’emploi très dynamique. Il avait une maitrise en droit qu’il a obtenue à l’université de Yaoundé 2. Généralement des gens qui ont des diplômes d’enseignement général sont convaincus qu’ils ne peuvent pas vite trouver du travail. Mais il était si dynamique que moi personnellement l’avait reçu – j’animais un séminaire sur les techniques de recherche de l’emploi. Après ce séminaire, les candidats sont appelés à corriger leur CV, et quand il est revenu, j’ai vu qu’il avait aidé sa cousine à vendre dans un restaurant. Il avait produit de lui-même un journal dans lequel il donnait des conseils juridiques. Le journal était à la deuxième édition. Quelque temps après nous avons reçu une offre de demande, la Caisse nationale de prévoyance sociale voulait vingt cadres juristes. Nous avons passé les tests pour quatre-vingt candidats. Et comme il n’était pas demandé aux candidats d’avoir une très grande expérience, l’entreprise allait les former elle-même, il avait été retenu, il était premier. Ce qu’il retenir de tout cela c’est que lorsqu’on est chercheur d’emploi, il ne faut jamais se laisser. Faites de la recherche de l’emploi votre travail à temps plein. On a des directeurs à la Sonara etc. donc, le réseau, peut-être, mais, votre dynamisme compte plus. Que les jeunes sortent de cette inertie que les poussent à croire que s’ils n’ont personne, ils ne pourront rien faire dans la société. La recherche de l’emploi est un emploi à plein temps.

Propos recueillis par

A.O

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