La patronne de MSMI fait office de manière très discrète du pont économico diplomatique entre le Cameroun et la Russie. Très écoutée par le Kremlin, celle qui fait partie des mains qui ont soigneusement préparé la seconde rencontre entre des chefs d’États africains et le président Vladimir Poutine fait sa lecture des travaux et lève un pan de voile sur les défis à venir.
Quelles leçons peut-on tirer après ce 2e sommet Russie-Afrique ?
Cette deuxième édition, je l’avais annoncé, marque un tournant à 360° des relations sous divers plans entre les deux pays. Ce qui a été le cas, à en juger par la présence effective, pour la toute première fois de sa présence à la tête du Cameroun, du président Paul Biya en Russie. Ce qui est donc un signal d’une puissance extrême. Je pense que le message de sa venue dans ce pays est très clair et n’a pas besoin d’être décrypté. Ceux qui se sont mis en retard, pensant que c’était une blague, croyant toujours aux velléités de l’Europe et de l’OTAN, vont très vite découvrir que la multipolarité du monde est effective, nous ne sommes plus dans les théories politiciennes et donc, la grande leçon à tirer après ce deuxième forum Russie Afrique coule de source et est d’une netteté limpide : ou on fait avec la Russie, ou on ne fait rien !
Pour les relations futures de son pays avec le Cameroun, le président Poutine met un accent particulier sur le renforcement de l’éducation (un grand nombre de bourses aux camerounais). En tant que patronne d’entreprise, comment percevez-vous cette approche ?
Nos ambassadeurs, quand on leur donne des bourses d’étude, ils les vendent. J’avais quitté ce projet il y a quelques années parce que pour moi c’était insupportable. Mais aujourd’hui, la Russie m’a replacé au centre de plusieurs projets donc celui de la formation professionnelle des jeunes. Dans les jours à venir, il y aura beaucoup de détails que je vous donnerai. Je sollicite un peu plus de patience à ceux qui nous lisent. Il y a des agréments avec beaucoup d’universités, beaucoup de bourses sont justement dans le viseur. Il s’agira de la technique. Ça va de l’aéronautique, la sécurité, l’agronomie en passant évidemment par le nucléaire. Il faut bien diviser ce segment. Il y a des bourses d’étude (aux étudiants) et il y a des bourses de formation dans lesquelles peuvent entrer les fonctionnaires qui sont encore un peu jeunes. Il faut que nous ayons une masse critique des gens assez solidement formés pour les années à venir.
Vous êtes une véritable mais discrète courroie de transmission entre le Cameroun et la Russie, quelle appréciation les russes font du Cameroun sur le plan économique ?
Le président Vladimir Poutine a été très clair dans tous ses discours, (comme celui du 30 juillet jour anniversaire de l’armée marine russe. Je vais rester cette « discrète courroie de transmission » comme vous le dites parce que je pense que beaucoup de membres de notre gouvernement sont encore pro OTAN et n’ont pas encore compris que le monde a changé. Je voudrais vous dire quelque chose de précis. Le président Poutine nourrit une très profonde, mais alors très profonde estime à l’endroit du président Paul Biya. Tout comme moi, mon estime à l’endroit du président de la République son Excellence Paul Biya est totale. Et donc, Moscou compte sur le Cameroun pour pouvoir mener une politique éco industrielle à tentacules sur toute la zone Afrique francophone.
Une stratégie pour attirer plus d’investissements russes au Cameroun et même sur le continent ?
Je pense que tout le monde a dû le voir que, à l’inaugural de ce sommet, juste avant la plénière, j’ai signé un protocole d’accord avec Eximbank of Russia et mon entreprise pour pouvoir mener à bien cette stratégie que je déploie depuis pratiquement 8 ans. Des investisseurs russes sont prêts à venir au Cameroun ainsi que dans d’autres pays et assurer le transfert de technologie dans notre zone géographique (la CEMAC) voire ailleurs car, pour le compte de la Côte d’Ivoire, j’ai été la garante pour le président de la Chambre du commerce ivoiro-russe, j’ai été la garante dans la signature de leur protocole d’accord. Cela dit, de toutes les façons sur le plan économique, je pense que cela fait huit ans que nous travaillons, il y a déjà beaucoup d’entreprises russes qui sont présentes au Cameroun. Nous ne faisons pas de bruits, nous travaillons dans le silence. J’ai fait au total environ 18 signatures sur des projets stratégiques de la CEMAC, voire d’Afrique francophone. Il y a beaucoup à faire.
Propos recueillis par Aloys Onana