650 conteneurs de Congelcam saturent l’espace portuaire. Les travaux devront trouver une solution pérenne qui satisfasse toutes les parties.
Le rendez-vous avait lieu ce mercredi 7 juin à Yaoundé. Le but, décanter une situation non seulement très embarrassante, mais aussi, aux conséquences économiques très importantes. C’est que, depuis le début de l’année 2023, la Régie du terminal à conteneurs (RTC) fustige la congestion dans ses installations.
Au total, un volume de 650 conteneurs de poisson qui trainent et qui ne sont pas évacués par Congelcam, le champion national en importations de produits frais et congelés, du poisson en majorité. Les sommations et mises en demeure de la RTC pour contraindre Congelcam à évacuer sa marchandise sont quatre. Les premières remontent à février 2023. D’autres ont suivi en avril, sans perdre de vue des réunions de concertation.
La dernière mise en demeure date du 1er juin 2023. La RTC dans ce document dévoile un peu plus en profondeur ce qui s’est passé pour qu’on en arrive à la congestion des conteneurs de poisson dont la qualité est de plus en plus compromise. Lin Onana Ndoh indique que Congelcam a importé durant les quatre premiers mois de l’année 2023 près de 3000 conteneurs frigorifiques de poisson, soit plus de 80 % des quantités importées annuellement depuis les deux dernières années, « très au-dessus de sa capacité d’accueil et d’écoulement », observe la RTC.
Qui ajoute que face à ce flux de conteneurs frigorifiques, « Congelcam s’est refusé de procéder à leurs enlèvements au débarquement, tel que le prévoient les règles établies en 2015 par le ministre du Commerce. » Aussi, se défend la RTC, pour préserver la santé des consommateurs, elle a investi dans l’acquisition et la location de groupes électrogènes afin d’accroitre sa capacité de branchement de 210 à 730 prises. « Au 29 mai 2023, le stock de Congelcam de près de 650 conteneurs frigorifiques met à rude épreuve les mécaniques et systèmes de congélation. Une soixantaine de ces conteneurs sont en effet en dysfonctionnement, dont une trentaine dégage de fortes odeurs nauséabondes », gronde la RTC.
Congelcam
Interpellé de toutes parts, Congelcam a tenu une conférence de presse le 5 juin à Douala. Dans sa défense, l’entreprise incrimine la RTC et les transporteurs qui ont emmené ces conteneurs, partis de Nouadhibou (capitale de la wilaya de Dakhlet, sur le Râs Nouâdhibou, dans la partie occidentale de la République islamique de Mauritanie) le 16 février 2023 à midi et sont arrivés à Douala le 2 avril 2023 à 13heures, selon des documents que nous avons consultés. L’entreprise, preuves à l’appui, fustige le non branchement de ces conteneurs frigorifiques pendant le voyage, et une fois arrivés à la RTC. Les demandes de courbe de température faites aux transporteurs sont restées sans suite, piaffe de colère Ismaël Tchoumtchoua, directeur général adjoint de Congelcam.
Le manifeste indique que les conteurs ont été normalement branchés du 29 janvier au 12 février 2023. Du 19 février au 12 mars, les branchements sont irréguliers. Dès le 12 mars au 2 avril, aucun branchement n’a été fait. A compter du 9 avril au 21 mai 2023, le rythme de branchement est totalement irrégulier, voire inexistant.
Une lettre a donc été envoyée au ministre du Commerce le 15 mai dernier, pour son « intervention urgente » « Nous avons constaté que la qualité de poisson contenu dans quatre conteneurs n’était pas bonne et nous avons saisi les autorités compétentes qui ont procédé à la destruction, aussi nous avons actuellement douze autres conteneurs de poisson de mauvaise qualité en attente de destruction devant nos entrepôts et dont nous avons pris attache avec les services compétents qui sont entrain de s’organiser pour cette opération de destruction. »
Dans une autre lettre en date du 23 mai 2023 -avec ampliation à la RTC et aux lignes maritimes- le patron de Congelcam s’adresse au chef secteur des douanes du Littoral I et accuse « l’insuffisance des prises » ses conteneurs « n’ont pas été branchés par la RTC pendant plusieurs semaines. »
27 milliards de FCFA
Dans cette affaire, Congelcam a déjà fait ses calculs. L’entreprise pointe du doigt la RTC et les transporteurs. Cette cargaison de conteneurs en compte certains qui ont déjà fait 90 jours dans des conditions de conservation questionnables. Ismaël Tchoumtchoua évalue le volume des marchandises à 27 milliards de FCFA. Et il est possible que les 15 mille tonnes de poisson soient entièrement avariées.
La situation de saturation de l’espace portuaire commence à se faire ressentir même au port autonome de Kribi, selon des indiscrétions. Ce qui fait des gorges chaudes. « C’est les conséquences du monopole d’un secteur par un seul acteur qui veut à tout prix occuper tout le marché sans mesurer ses propres capacités et celles du port de Douala et de Kribi qui ne font pas que conserver du poisson. Il y a des fruits et bien d’autres produits qui ont besoin d’espaces frigorifiques. Il faut satisfaire tout le monde, sans piétiner les petits », souligne un opérateur, pour qui, à partir de cet incident, le gouvernement doit revoir sa stratégie sur la politique d’importation de poisson.
Les avocats de Congelcam eux, ont servi une sommation le 28 avril 2023 à la RTC et attendent la voir prendre ses responsabilités. Une situation complexe donc, que le Luc Magloire Mbarga Atangana devra régler ce 7 juin à Yaoundé. En rappel, entre 2014 et 2015, le PAD avait connu une très forte congestion, qui avait abouti à de nombreuses recommandations parmi lesquelles, l’enlèvement le plus rapidement possible des marchandises, la création des porcs secs pour désengorger l’espace portuaire et pour éviter de transformer cet espace en zone de stockage.
Aloys Onana
