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Constant Mouaffo Siewe : un surdoué de la mécanique en exil

by EDC
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Son adhésion au parti politique Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (Mrc) lui a valu une sortie sinueuse et rocambolesque hors du territoire camerounais. Pour avoir  adhéré à l’idéologie de ce parti et pris part à la marche qu’elle organisée le 26 janvier 2019, plusieurs grosses têtes de l’intelligentsia camerounaise, militants et sympathisants locaux ou de la diaspora sont aujourd’hui abandonnées à leur triste sort par leur hiérarchie politique et quasiment bannis de leur pays natal.

C’est désormais officiel. Le Mrc marque son opposition à la tenue le 6 décembre 2020, de l’élection régionale au Cameroun. Ce parti politique, envisage d’ailleurs, d’après Maurice Kamto, le président national, organiser à cet effet une marche pacifique de protestation en vue  de «chasser le Président Paul Biya». Pour y parvenir, le Mrc espère un soutien massif du «peuple camerounais», de «la diaspora», surtout de ses militants. 

Pourtant de plus en plus de voix s’élèvent au sein  de cette formation politique, contre les choix du président national Maurice Kamto. Parmi les grandes gueules et esprits libres du parti politique arrivé deuxième à l’élection présidentielle d’octobre 2018, Célestin Djamen, Secrétaire national en charge des droits de l’homme et de la gouvernance au sein du Directoire national du Mrc sort du lot. 

Ses récentes réserves portées sur le déroulement de l’opération «Survie Cameroun» lancée par le Mrc dans le cadre de la lutte contre la Covid-19 au Cameroun, lui ont valu d’être voué aux gémonies par des camarades  de parti, qui voient en lui «un traître», «un incapable», voire un infiltré. Célestin  rallonge ainsi la longue liste des écorchés vifs du Mrc, sans aucune reconnaissance effective (principaux acteurs de la marche du 26 janvier 2019).

Sur le projet de  marche pacifique sus-évoqué, Célestin Djamen tient une fois de plus une position à contre courant de son parti politique : « le Président Paul Biya a été élu, il faut respecter son mandat. Les lois de la République doivent être respectées», a-t-il indiqué sans ménagement. Est-ce un ras-le-bol ? Célestin Djamen prépare-t-il un éventuel départ du Mrc? Ses positions traduisent-elles une baisse d’engagement ?  

Seule certitude, l’engagement dévoué au sein du Mrc n’est toujours pas porteur d’espoir. Pis, une ouverture vers un exil forcé. Tel est le cas de plusieurs de nos compatriotes. Parfois des talents et cerveaux: médecins, avocats, architectes, hommes d’affaires, journalistes ou des artistes etc. paient aujourd’hui le prix fort de leur soutien au Mrc. De nombreux militants ou sympathisants du Mrc sont aujourd’hui des victimes expiatoires à cause de cet engagement indéfectible: Me. Ntimbane, Richard Bona, Rémy Ngono, Waffo Wanto, Thiam Abdoulaye, Azonsop Tchetchago Nelson, Michel Biem Tong etc.

Comme Célestin Djamen, Constant Mouaffo Siewe, jeune mécanicien automobile, avait fièrement participé à la grande mobilisation baptisée «Marche contre le hold-up électoral» dans les artères de la ville de Douala, aux côtés de Célestin Djamen, Me. Michelle Ndoki, ou encore Mathias Kameni, des cadres de ce parti. Bonaberi, Akwa, et Bonamoussadi des quartiers  de la ville de Douala constituaient les principaux épicentres de la marche du Mrc malgré son interdiction par les pouvoirs publics. Ces derniers allaient d’ailleurs réagir manu militari dès le démarrage de la marche de protestation. La ville de Douala était quadrillée par des escouades de forces de l’ordre lourdement motorisées et armées: police, gendarmerie, anti-gangs munis de matraques, pistolets automatiques, fusils à pompe ou de véhicules  de transport de troupe et anti-émeute. S’en sont suivis immédiatement dans tous les points de convergence de la marche, des interventions musclées dissuasives (gaz lacrymogènes, jets d’eau etc.) La marche dite contre le hold-up électoral s’est soldée par des bastonnades sur les manifestants, ainsi que des arrestations des militants et cadres du Mrc, Constant Mouaffo Siewe, âgé de 25 ans.

Les personnes interpellées ont été immédiatement conduites dans un lieu de détention tenu secret de la ville de Douala. Puis, transférées dans la ville de Yaoundé quelques jours après dans un autre lieu de détention secret, mais dans des conditions difficiles et inhumaines. Comme certains de ses camarades sacrifiés du Mrc, Célestin Djamen Constant Mouaffo Siewe, activistes teigneux, auront droit chacun à des cachots particuliers insalubres, dans la promiscuité et l’obscurité. Après un séjour cauchemardesque dans les geôles de Douala et Yaoundé, Constant Mouaffo Siewe réussira à s’échapper miraculeusement de son lieu de détention. 

Filatures et intimidations

Pourtant, la largesse présidentielle ne sifflait malheureusement pas la fin des tensions: appels inconnus, diverses intimidations, filatures etc. Toute chose qui va pousser  Constant Mouaffo Siewe à quitter clandestinement le territoire camerounais en mars 2019. Abandonnant famille, amis et connaissances. Comme pour Bifaga, Stypak Samo, ou Armand Laklass le périple  de Constant Mouaffo Siewe sera long et douloureux. Mais surtout incertain, compte tenu  de la pénibilité, la dangerosité et les moyens limités. Le trajet sinueux du jeune militant du Mrc, persécuté et sans le soutien de sa hiérarchie.

Après être passé miraculeusement entre les mailles du filet des agents  de la police du Cameroun, et quasiment abandonné par son parti politique, Constant Mouaffo Siewe craint pour sa vie en cas de retour au Cameroun. Chose audacieuse que sa famille lui déconseille d’ailleurs vivement, car activement recherché. Ce drame sociopolitique vécu par plusieurs marcheurs du 26 janvier 2019 est caractéristique  de la crise entre la base et la hiérarchie du Mrc, à la croisée des chemins. Entre guerre civile dans les réseaux sociaux, militants divisés, positions contraires sur les choix stratégiques du parti, les choix des militants et sympathisants du Mrc sont parfois douloureux et contreproductifs pour leur avenir. Le cas de Constant Mouaffo Siewe est fort évocateur de la situation instable et incertaine de milliers de compatriotes engagés vivant dans divers pays d’Afrique, d’Europe, d’Asie ou d’Amérique.

Albright Fandono

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