L’auditeur bancaire se penche sur une question d’actualité qui touche une bonne partie des acteurs économiques importateurs hier, confinés aujourd’hui.
La situation du coronavirus affecte des vies humaines. Il y en a qui ont été supprimées définitivement. Certaines sont dans le pipe. Et d’autres seront sauvegardées. L’économie, mue par l’homme, est pratiquement à l’arrêt. Et ceux qui paient le lourd tribut, sont nombreux, notamment ceux qui ont contracté des dettes auprès des banques avant la pandémie du covid-19 et qui ont passé des commandes, pour des marchandises qui n’arriveront peut-être jamais. Ou arriveront dans un contexte difficile de très faible consommation. Or entre les banques et leurs clients, les règles sont établies. Il faut surtout rembourser. C’est là où il risque d’avoir un os. Surtout dans la gorge de ceux ont déboursé et ceux qui ont reçu. Certains seront dans l’incapacité de payer, et d’autres, tomber en faillite.
Pierre Numkam pense qu’il faut déjà y penser et apporter des solutions pérennes. Mais la plus importante, c’est la mise en application du « cadre amiable », institué par l’ordonnance n°003 du 27 avril 1990 par Paul Biya. « La piste que le Cameroun doit implémenter et qui servirait d’exemple aux pays du monde entier, c’est de comprendre que le système bancaire doit fonctionner dans un cadre amiable. Autour d’une même table de travail, on doit retrouver en premier lieu l’épargnant, qui doit s’assurer que l’épargne qu’il confie en dépôts aux banques a été sereinement utilisée pour l’entreprise qui travaille dans des conditions idoines pour rembourser », indique Pierre Numkam.
Fin avril-mi mai 2020, est née une polémique. Relative à la dévaluation du FCFA. Une méprise de la Banque des Etats de l’Afrique centrale. Qui a vite corrigé sa bourde. En face, les économistes, parmi eux, Pierre Numkam, observe la scène, la passe au crible, et dégage les voies qu’il juge salvatrices pour l’économie camerounaise, après coronavirus. « Le gouverneur de la banque centrale nous fait comprendre -et il a raison – que la dévaluation n’est plus à l’ordre du jour. C’est vrai. Mais à quel prix ? C’est au prix des entreprises qui importaient et qui, par la crise du coronavirus, sont confinées, bâillonnées et donc, il faut repenser autrement et cela voudrait que chacun comprenne que la banque et l’épargnant doivent se mettre ensemble et aller rechercher les solutions internes.
« Les entreprises qui importaient hier doivent chercher les activités internes pour rembourser les crédits et là, cela implique qu’il y ait un dialogue social. Et dans le cadre amiable, toutes les parties prenantes se mettent ensemble pour laisser le temps et se relancer à l’intérieur pour travailler et rembourser les crédits », insiste ce banquier, qui était face à la presse le 26 mai 2020 à Douala.
Un moment au cours duquel Pierre Numkam a ébauché la figure de l’économie mondiale et ce que devront faire les autorités politiques et acteurs économiques du Cameroun. « Nous sommes tous des épargnants, nous sommes donc tous touchés par la crise sanitaire. Et quand ces banques en difficultés vont tomber en faillite, chacun de nous va en faire les frais. Nous lançons donc un appel, que toutes les entreprises qui sont en difficulté comprennent que rien n’est perdu. La crise sanitaire actuelle est un appel divin à repenser nos économies, à nous tourner davantage vers l’intérieur. Ceux qui vont aller à Dubaï etc. importer les déchets les déposer chez nous, l’heure est finie. Quand on sortira de cette crise, même nos gouvernants doivent comprendre qu’ils doivent fermer les frontières. L’heure est au protectionnisme. Il faut donc que tous ceux qui ne parviennent pas à rembourser leurs crédits viennent à nous, nous avons l’expertise qu’il faut car avec le cadre amiable, on peut créer 5000 emplois. »
Godlove Tekam