L’énergéticien Eneo, filiale camerounaise du fonds d’investissement britannique Actis, est depuis 2019 engagé dans une nouvelle phase du contrôle de la consommation de l’électricité par ses clients. L’idée séduit. Sur la page Facebook de l’entreprise, les témoignages donnent du tournis. « C’est vraiment bien facile à contrôler sa consommation », salue un internaute. « J’ai le compteur ordinaire, comment faire pour avoir l’autre-ci ? » « J’adore ce truc, plus besoin de faire le rang à l’agence pour payer mes factures. » « C’est mieux pour nous autres. » « Très efficace et simple à utiliser. » « Besoin de deux compteurs prépayés. » « Les bailleurs mangeront où ? » « J’ai vraiment besoin de ce compteur, mais je ne sais vraiment pas comment l’obtenir. » « Les occasions comme celle-ci doivent être présentées au grand public. » La liste est loin, très loin d’être exhaustive
L’innovation accroche. Tout comme le changement des compteurs anciens, par de nouveaux intelligents. Problème ? Il y a des associations qui pointent du doigt l’obligation imposée aux clients à changer leur compteur. L’affaire intéresse en apparence. Là où il y a un os, c’est que l’entreprise ne force personne à passer du compteur post payé à celui prépayé en l’occurrence. De sources bien au fait de cette innovation et au contrôle des activités d’Eneo relèvent l’avenant numéro 30 du contrat de concession. Impossible donc de forcer quoi que ce soit.
Dans une note d’information rendue publique, Eneo jette un faisceau de lumière sur les compteurs prépayés qui ne laissent pas indifférents de nombreux clients. « Dans le cadre du déploiement des compteurs à prépaiement (CPP) et en conformité avec les engagements pris auprès de l’Etat de moderniser son parc, Eneo annonce que le pallier de 150 .000 compteurs installés a été dépassés au cours du mois de juillet 2021. »
Le business est clair. Il fonctionne comme le crédit de consommation du téléphone portable. Si le client juge qu’il peut consommer 5000 FCFA par exemple, il charge son crédit. S’il arrive qu’il est épuisé pour des raisons de sur usage, le client peut tranquillement recharger. Il change ses habitudes de consommation, il n’est pas possible payer ce qu’on n’a pas consommé.
Satisfaction ?
Depuis le lancement de cette innovation, Eneo, indique –t-on, a confié une enquête au cabinet VISA Cameroun, question de jauger l’appréciation. L’enquête a été menée auprès de 1 105 clients. « Cette innovation a contribué à améliorer l’indice de satisfaction générale perçue par les utilisateurs de CPP interrogés. » Ainsi, 58,6 % de clients en 2020 contre 35,10 % en 2013 sont satisfaits des services d’Eneo. « Le projet débuté sous la forme pilote a connu une évolution progressive au fil des années. 47 000 nouveaux clients prepaid en 2020 contre 20.000 en 2019. Ce qui portait à 67.000 le nombre de clients ayant choisi la solution. A ce jour, le pallier de 150.000 compteurs installés a été largement franchi. »
Barons de la fraude
Un fait reconnu du côté d’Eneo, c’est la mise en quarantaine « des barons de la fraude ». Cette appellation désigne les distributeurs du courant électrique dans les quartiers des grandes métropoles. Près de 60 d’entre eux ont déjà été neutralisés et mis à la disposition de la justice, plus de 10 agents Eneo ont été licenciés pour intelligence avec les réseaux indélicats. « 70 % de clients honnêtes subissent 30 % de clients ou consommateurs indélicats ». Une bataille qui se poursuit car, plus de 60 milliards de FCFA sont perdus par an, ce qui est largement supérieur au budget d’investissement de l’entreprise (45,7 milliards de FCFA en 2020) en l’occurrence.
Aloys ONANA