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François Xavier TEMBIWA

by EDC
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« Zone de libre échange continental, le chemin reste long »

Son entreprise distribue des produits pétroliers depuis de longues décennies. Et à l’heure où l’on parle de la zone de libre échange continentale, cet homme de terrain nous livre son analyse.

Cela fait pratiquement t deux mois que la Société nationale de raffinage a brulé. Avez-vous ressenti les secousses de cet incendie à votre niveau?

L’incendie à la Sonara est un évènement malheureux pour notre pays avec tout ce que nous traversons à présent. Mais le gouvernement a pris des dispositions pour que le marché ne soit pas affecté.  Et je peux vous témoigner que ces dispositions marchent. Nous n’avons pas connu de ralentissement dans la fourniture. C’est vrai qu’il faut mentionner que la Sonara importait déjà plusieurs  types de produits, y compris les produits finis. Plusieurs marketeurs d’ailleurs sur le plan national importent du carburant fini, du gaz.  Nous dépendons du gaz importé depuis presque deux ans.  L’incendie n’a donc pas eu un impact particulier. Vivement qu’elle redémarre afin qu’elle joue son rôle de raffinage de produits pétroliers pour l’ensemble du marché camerounais  et sous-régional.

Cela veut dire que vous n’avez pas été obligés de réduire vos commandes ?

Non, du jour au lendemain il n’y a pas eu de perturbation sur le marché. Le gaz domestique est presqu’entièrement importé. A part ce qui est produit à Bipaga aujourd’hui, dans le Sud du Nigeria, la plupart des gaz mis sur notre marché est importé. Cela dit, nous n’avons pas connus de perturbations. Je peux dire qu’on a plus connu des perturbations suites aux évènements  du Nord-ouest et du Sud-ouest où les ventes ne sont plus classiques, elles ont énormément baissé quand elles existent.

Parlez-nous des performances de votre entreprise en 2018…

2018 a particulièrement été difficile. Nous  avons connu une légère croissance sur le gaz domestique. Mais on a connu une baisse d’activité sur le carburant. Je tiens à rappeler qu’il est impératif que les démembrements du gouvernement, c’est-à-dire les différents services (les Finances, les douanes, la Caisse nationale de prévoyance sociale etc.) regardent les opérateurs économiques comme des partenaires de développement et non comme des opposants car il y a plutôt un conflit permanent entre ces différents démembrements et les opérateurs économiques. Ce que je crois être difficile comme facteurs de développement. C’est vrai, nous sommes dans un pays où il y a une forte perte de valeur sociale, où il y a beaucoup de corruption, des individus se mettent au pas de cette vie. La cohésion, une relation beaucoup plus sympathique entre les administrations et le secteur privé devrait apaiser le climat social et permettre que les entreprises connaissent une vraie expansion. 2018 a été difficile, nous avons connu une légère croissance, certes pas comme les années 2008, 2010, mais les performances sont bonnes. Elles auraient été meilleures s’il n’y avait pas la situation du Nord-ouest et du Sud-ouest. La disparition du marché y est notoire sur le chiffre d’affaires réalisé.

Une idée du chiffre d’affaires ?

Dans notre cas ce n’est pas une information classifiée, puisque nous sommes numéro 2  sur le marché du gaz, sur le marché des carburants nous sommes aujourd’hui  11e  sur le nombre d’opérateurs sur le pays, nous avons eu de bons marchés, à l’instar de celui de Piccinni- construisait le stade d’Olembé à Yaoundé- c’est vrai qu’avec l’arrêt du chantier là-bas, nous avons laissé une ardoise de plus de 300 millions de FCFA que nous revendiquons à l’ opérateur de construction du stade. Cela vient affecter le résultat et la trésorerie de la société. Nous avons gardé la deuxième place sur le marché du gaz avec presque 17 % de parts de marché. Il y a une réduction relative en terme de part de marché et mais  il y a eu une consistance sur la croissance elle-même.

Il y a un an vous envisagiez avoir une représentation en RCA…

Dans notre volonté d’expansion nous avons le Tchad dans le viseur, la RCA, nous avons depuis peu, le Rwanda aussi, c’est vrai c’est un marché délocalisé par rapport ici, mais le Rwanda est un marché assaini. Je crois que c’est un pays qui présente un bel exemple économique en Afrique. Nous pensons à juste titre aller sur ce marché. Mais en RCA nous avons connu beaucoup  de lenteur, nous avons eu la notification d’agrément, je crois que dans les jours qui viennent nous pourrons avoir un agrément signé du président de la République afin que nous puissions entrer officiellement. Il y a une infiltration frauduleuse de nos produits là-bas, je crois que le gouvernement gagnerait qu’on soit officiellement présent afin de réduire ce trafic sur les frontières et fournir aux populations un produit dont elles ont absolument besoin.

Cela nous conduit donc directement au sujet de l’heure, la zone de libre échange continentale. Quel regard jetez-vous sur cette actualité ?

Les politiques ont beaucoup de rêves et généralement parlent plus vite. Mais les opérateurs économiques que nous sommes souhaitons plutôt voir des réalités. Je crois qu’il y a encore des barrière douanières entre Etats qui ne devraient plus exister si vraiment on voudrait que l’économie africaine décolle et regarder le développement du vaste marché interne car à chaque fois qu’on étend son marché on crée des emplois, on améliore le climat social . A terme on paie les impôts. Ça ne fait pas de sens que j’importe les bouteilles de gaz au Cameroun et pour les emmener au Tchad je paie encore les droits de douane entre le Tchad et le Cameroun, comme si j’importais à nouveau. Cela fait que le prix de revient coutera deux fois qu’à Douala. Pareil pour la Centrafrique. Alors que si on considère qu’une fois importé d’un fournisseur étranger à l’Afrique, on devrait permette que cette marchandise circule désormais, surtout qu’on regarde le bien être social. J’ai la seule usine de fabrication de bouteilles en Afrique centrale aujourd’hui, mais tant que ces barrières ne sont pas tombées, les prix des bouteilles dans la sous-région vont continuer de flamber, et pourtant une usine est là, importe la matière première, paie les droits de douanes dessus, et devrait simplement les écouler sur l’ensemble du marché sous régional et pourquoi pas un peu plus loin, jusqu’au Soudan, au Mali, car à part le Nigeria où on trouve une usine de fabrication de bouteilles de gaz, il n’y a que le Cameroun, o ù nous sommes présents.

Les freins donc à la zone de libre échange continentale ?

Ils sont essentiellement politiques. Je crois qu’ils devraient garder un œil sur une ambition globale. Et bien entendu les infrastructures, mettre un peu plus d’énergie dans la logistique pour permettre que le libre échange soit effectif. C’est clair que lorsqu’on charge un camion de gaz à Douala, pour le conduire en RCA ou au Tchad, on peut facilement passer une semaine sur la route à cause de son état. On ne résoudra pas ces freins en seul jour. Mais il faudrait que les politiques se mettent déjà en place en vue de bâtir quelque chose.

L’Afrique parle de libre échange alors que son industrie cherche encore son souffle. Quels secteurs clés développer pour que les échanges commerciaux soient plus bénéfiques et diversifiés ?

Le tissu industriel doit s’appuyer sur des industries de base, donc la fabrication mécanique qui est une industrie essentielle. On ne voit pas du tout les entreprises de fabrication mécanique installées. Si vous avez besoin d’un boulon, on le commande, il est importé. Vous pouvez attendre de longs mois pour cela. Il y a l’industrie de base, des petites choses classiques. Il faudrait que ces petites entreprises s’installent d’abord etc. La création des petites entreprises de base est impérative.

Propos recueillis par

Aloys Onana

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