Je commencerai par une question simple pour ceux qui sont installés en occident. Pourquoi vous ne partez pas vivre en Russie, même gratuitement ? Vous savez que ce n’est pas un pays ouvert. C’est une dictature encore plus féroce et brutale que celles dont les pratiques totalitaires d’un autre âge débordent sur le continent africain et exècrent tout esprit résolument épris de liberté et de justice.
Mais revenons au sujet. Quand vous dites que l’OTAN a “encerclé” la Russie. Savez-vous que la Russie est territorialement limitrophe avec 14 ou 16 pays, dont 4 ou 5 (maximum) membres de l’OTAN ? Officiellement j’en connais 4 (Lituanie, Lettonie, Pologne, Estonie). Savez-vous que parmi les voisins de la Russie figurent des pays dotés d’une puissance nucléaire et militaire hypersonique tels que la Chine et la Corée du Nord, avec lesquels Moscou pourrait opportunément reconstituer une alliance anti-OTAN et y intégrer les autres voisins, afin de reconfigurer un nouvel équilibre de la terreur, sans avoir besoin de s’attaquer directement à des États souverains ?
Savez-vous que la Russie arme lourdement la Biélorussie, voisine de l’Ukraine, la Pologne, la Lituanie et la Lettonie ? Savez-vous que la Russie est passée maître dans l’art des invasions, l’annexion et la reconnaissance des territoires séparatistes plus ou moins pro-russes (Ossétie-du-Sud en Géorgie en 2008 ; la Crimée, Donetsk et Lougansk en Ukraine, respectivement en 2014 et 2022) ? À cette allure elle risquera un jour reconnaître l’indépendance de l’Ambazonie au Cameroun si un tant soit peu elle y sent quelque intérêt important. Mais bon… Avançons.
Quand vous dites que les États-Unis et l’OTAN veulent “à tout prix” intégrer l’Ukraine dans leur organisation militaire. Savez-vous que l’Ukraine, la Géorgie et la Bosnie frappent délibérément depuis 1990 aux portes de l’OTAN sans succès et que de nombreux pays, anciens membres du pacte de Varsovie ont ‘’librement’’ choisi de rejoindre l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord ?
Quand vous convoquez la notion de “guerre préventive” en prenant pour exemple la crise des missiles nucléaires soviétiques sur l’île de Cuba en 1962. Savez-vous que ces missiles étaient pointés en direction des États-Unis ? Savez-vous que pour éviter une troisième guerre mondiale entre puissances nucléaires, Washington avait plutôt négocié avec l’Union des Républiques Socialistes et Soviétiques (URSS) sans se précipiter à attaquer militairement cet allié soviétique ?
Mais enfin, pouvez-vous dire concrètement en quoi l’Ukraine menaçait-elle directement la sécurité de la Russie tel que démontré par exemple dans le cas de la crise des missiles de Cuba ? L’invasion de l’Ukraine n’est qu’un prétexte pour Vladimir Poutine qui digère peu la chute du mur de Berlin et surtout, la dislocation de l’URSS, vitrine quasi-impériale de l’hégémonie russe sur de nombreux pays de l’Est. L’ancien lieutenant-colonel du KGB veut reconstituer cette sphère d’influence perdue, au mépris de la souveraineté et du droit absolu des États à disposer de leur destin militaire.
On parlera peut-être une autre fois de la Libye de Kadhafi ou encore de l’Irak de Saddam Hussein qui ont été injustement bombardés par l’OTAN, mais ce n’était pas pour les mêmes enjeux, ni pour les mêmes motifs et quoiqu’il en soit, aucune invasion militaire d’un État souverain par une puissance étrangère ou un groupe de puissances n’est admissible de nos jours. Le monde doit apprendre de ses erreurs.
NJIKI FANDONO
Journaliste. Dfenseur des droits humains
Membre d’Amnesty International France