Face à cette situation inquiétante, le ministre des Finances [photo] suggère une véritable accélération de l’import substitution.
Le Cameroun est une économie qui ne vit pas en vase clos. Sa corrélation avec d’autres économies du monde l’emmène à de fortes fièvres lorsque sur le plan international, la situation économique est morose. C’est ce qui a été le cas en 2022. Et, malheureusement, en 2024, la situation s’annonce encore plus préoccupante. D’où la sonnette d’alarme de Louis Paul Motaze, ministre des Finances (Minfi). « Après des taux progressifs de 3,6% et d’environ 4% respectivement en 2021 et en 2022, la croissance économique est révisée à 3,8% pour l’année en cours, en raison au renchérissement des coûts de production, causé par la hausse du niveau général des prix des biens et produits importés, des perturbations des circuits logistiques d’approvisionnement, consécutifs au conflit sus évoqué et de la dépréciation actuelle de l’euro vis-à-vis du dollar », débute le Minfi.
Qui va plus loin, et fait une annonce qui pourrait avoir de fortes conséquences négatives sur l’économie locale, un peu trop dépendante des ressources pétrolières qui lui ont permis d’empocher 800 milliards de FCFA l’année dernière. L’année prochaine, la donne pourrait bien être décevante. «La préparation du budget 2024 se déroule dans un contexte de fortes incertitudes au plan national. Les perspectives ne sont guère reluisantes, en considération de l’absence de visibilité sur l’issue du conflit en Ukraine. Des conséquences de la dépréciation du dollar et de l’instabilité du marché du pétrole. Les incertitudes qui pèsent ainsi sur l’économie mondiale invitent à la prudence quant à la prévision d’une hausse substantielle du niveau de ressources propres en 2024, dans un contexte de baisse des cours et d’effritement progressif du potentiel de mobilisation de recettes pétrolières, dont les projections du dernier cadrage budgétaire prévoient, pour 2024, une diminution de plus de 195 milliards de F CFA par rapport à 2023. »
La situation est donc alarmante, si bien que même les partenaires au développement réfléchiraient par deux fois, avant de délier les cordons de la bourse. L’on ne saurait donc compter sur les levées de fonds à l’international. « Ces projections ne sont pas meilleures s’agissant des ressources de financement qui pourraient elles aussi, connaitre en 2024 une importante contraction, en raison de celle des appuis budgétaires et des emprunts intérieurs. »
Des grandes lignes
Malgré ce tableau quasi inquiétant, le Minfi dresse les poches de dépenses prioritaires en 2024. Il ressort qu’une attention plus soutenue sera faite en direction de toutes les zones en crise à travers le pays, afin d’y ramener la paix, sécuriser les personnes, leurs biens et favoriser leur reconstruction. Aussi, l’on devra « accélérer l’implémentation de la politique de l’import substitution, socle de la SND30, assurer le paiement des loyers consentis par l’Etat au profit des opérateurs engagés dans le cadre des projets financés à travers le modèle du Partenariat Public Privé ; finaliser le processus de décentralisation par la mise en place des régions ; soutenir l’extension de la couverture sanitaire universelle à toutes les couches de la population. »
D’autres projets sont dans le pipe, comme relever le niveau des dépenses sociales en faveur des couches défavorisées en conformité avec les objectifs du programme économique et financier. Finaliser les grands projets portuaires, routiers, autoroutiers et énergétiques à travers le pays et les mettre en service: contribuer à l’entretien des infrastructures construites et mise à la disposition du mouvement sportif national dans le cadre de l’organisation de la CAN 2022.
Pour le Minfi, l’augmentation des ressources internes appelle à renforcer la croissance économique, à travers l’accélération de la politique de l’import substitution. Il s’agira, explique-t-il, de veiller à une affectation prioritaire des ressources au développement des filières de production agricole et pastorale de grande consommation et au renforcement des capacités de transformation locale et d’exportation des produits à grande valeur ajoutée, « afin d’assurer une meilleure maitrise de l’inflation concernant les biens alimentaires et disposer de ressources pour limiter le recours à l’endettement. Cette augmentation des ressources devra également s’appuyer sur un environnement fiscal favorable à la relance économique et caractérisé par la simplification des procédures et un suivi plus rigoureux des contribuables. »
Le séminaire de préparation du budget 2024 à Yaoundé le 13 juillet 2023 avait pour thème “Rationalisation des choix budgétaires face aux crises internationales, pour l’atteinte des objectifs de la SND30”.
Aloys Onana