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Vanessa Ongmetana : la mise en œuvre de la ZLECAf doit passer par un meilleur engagement des États

by EDC
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Associé Au cabinet ORIN CONSULTING GROUP LTD et experte en relations publiques, relations avec les administrations publiques et business development, Vanessa Ongmetana  définit les clés pour la mise en œuvre réussie de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF).

L’Union africaine (UA) n’en pouvait plus de ronger son frein à propos de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF). Ce marché commun, annoncé comme une chance pour le développement du continent, a été lancé à grands renforts de publicité en 2021. Un début poussif à cause de plusieurs facteurs limitant que l’économiste Kasirim Nwuke, ancien des Nations unies, a pris soin d’énumérer dans une tribune qu’il signe dans Jeune Afrique : timing inadéquat, financements insuffisants, risques élevés… Ce à quoi on peut bien sûr ajouter le peu d’engagement des Etats africains, qui n’hésitent pas à prioriser leurs intérêts nationaux.

L’un des exemples les plus explicites de ce cloisonnement des Etats est la politique douanière. Wamkele Mene, le secrétaire général de la ZLECAF, expliquait, il y a peu, que dans le cadre de la mise en œuvre de ce marché commun panafricain, il est devenu impératif d’arrêter de considérer les droits de douane comme un outil de revenu mais plutôt comme un outil de développement industriel. Bien qu’il s’agisse d’un impératif, les capitales africaines continuent de trainer le pas car les recettes douanières constituent souvent une part non négligeable de leur budget.  

A la réalité, cet aspect pécuniaire n’explique pas à lui seul le peu d’engagement des Etats africains. En rappelant que la ZLECAF est la création d’un marché continental libéralisé et non discriminatoire, c’est-à-dire la circulation des marchandises en franchise de droits et de contingents, il faut tout de suite préciser que lors de l’adoption des accords de la ZLECAF par l’UA, chaque pays a gagné le droit d’établir une liste de produits qui échappent aux exonérations douanières. Le fameux principe de libération des produits.

Les accords de la ZLECAF n’imposent pas aux Etats un délai de libéralisation des produits importés sur leur territoire. Cela peut être perçu comme le désir de l’UA d’aider les Etats à travailler à la soutenabilité de leurs économies. Cette mesure ou sollicitude semble plutôt avoir créé l’effet inverse : la méfiance des Etats. De ce fait, les Etats ont chacun défini les processus spécifiques à la libéralisation des produits importés sur leur territoire.

Le cas du Cameroun. Dans le cadre de la mise en œuvre des accords de la ZLECAF, l’Etat a classé ses produits en 3 catégories :

  • Catégorie A : renferme les produits importés qui subiront une libéralisation rapide. Elle est composée de 90,01 % de lignes tarifaires, soit 5 255 produits. Ce groupe de produits sera démantelé en utilisant une approche dite linéaire, sur une période de 10 ans, pour aboutir à un droit de douane nul.
  • Catégorie B : elle, comporte les produits sensibles (produits localement). Elle se compose de 6,99 % de lignes tarifaires, soit un total de 408 produits que le pays va libéraliser sur 13 ans, avec un moratoire de 5 ans.
  • Catégorie C : Les produits exclus de la libéralisation avec 175 produits, soit une proportion de 2,99 % de lignes tarifaires. Dans ce dernier groupe, on retrouve des produits tels que la farine de froment, la farine de maïs, l’huile de palme brute, l’huile de palme raffinée, les sucres, les gommes à mâcher, les bonbons, les pâtes alimentaires, les jus de fruits, les ciments Portland, les ciments de colle, les défrisants, les savons et gels de douche, les profilés d’aluminium…

Si cette catégorisation des produits par le gouvernement camerounais, s’aligne à la stratégie de soutenabilité de l’économie camerounaise, dans le but d’être le plus possible compétitif face à la réalité et aux enjeux de la ZLECAF, cette catégorisation peut ne pas correspondre aux autres Etats membres, qui eux aussi ont l’obligation de garantir la soutenabilité de leur économie. Les périodes définies pour libéraliser les produits importés sont à la discrétion des Etats. Ils ne tiennent compte que de leur réalité et leurs intérêts.

Ce système ne rassure pas les Etats. À ce système de libéralisation des produits importés par les Etats, s’ajoute les procédures de normalisation des produits sous ZLECAF. Les produits exportés par les Etats dans le cadre de la ZLECAF sont soumis aux obligations de normes et qualités des pays. Chaque pays en fonction de sa stratégie économique défini les obligations des structures et normes et qualités. Cependant elles ont généralement les mêmes prérogatives, s’assurer que les produits qui entrent sont conformes à leurs exigences et à celles de la santé. Mais elles ont aussi une prérogative très peu révélée, permettre aux produits locaux de qualité d’être compétitifs.

Ces deux aspects dans la mise en œuvre de la ZLECAF ne sont pas du tout inclusifs, et l’UA ne semble pas avoir prévue de mettre sur pied des instances qui auront pour rôle de réguler les mesures prises par les Etats dans le cadre des accords.

C’est pour cette raison que nous croyons que la mise en place des délais de libéralisation des produits importés par les Etats. Elle donnerait une période de mise en œuvre obligatoire du principe de libéralisation aux Etats, en contrepartie, elle développerait des mécanismes de protection de la production locale et de la soutenabilité des économies.

Pour ce qui est des mesures de normes et qualités, une agence panafricaine de normalisation pourrait être créée. Elle pourrait avoir un rôle de contrôle sur les agences pays, et s’assurer que ces dernières élaborent des lois qui intègrent le principe de libre circulation défini par les accords de la ZLECAF. Cette agence pourrait avec la participation des Etats membres structurer une réglementation des exigences et obligations des normes et des qualités auxquels les produits soumis aux accords seront assujettis. Cela suppose qu’au préalable les Etats auront le droit de choisi quel produit (production locale) ne seront pas soumis à la concurrence des autres produits d’ailleurs. Là encore il faudrait que cette mesure soit encadrée.  

Ainsi, dans la mise en œuvre de la Stratégie Nationale de Développement 20230 (SND30) par l’Etat du Cameroun une place de choix est donnée à la politique de l’import-substitution. Cette politique consiste pour le Cameroun de capitaliser sur le renforcement de la production locale, la réduction de la dépendance aux importations, et la promotion du Made in Cameroon.  Pour atteindre ce but, des institutions d’accompagnements ont créé. C’est le cas des structures comme : le Bureau de Mise à Niveau des Entreprises (BMN) – sa mission principale est de mettre en œuvre la politique du gouvernement en matière d’appui à la mise à niveau et la restructuration des entreprises industrielles au Cameroun. Cette mise à niveau est principalement en faveur des PME industrielle. Le programme transfagri- La finalité de ce programme est de dynamiser les secteurs agricole et agroalimentaire grâce au développement et à la pérennisation d’un écosystème de services au bénéfice des acteurs économiques locaux notamment les PME, GIC et les coopératives. Au vue des structures mises en place par l’Eat du Cameroun, l’on pourrait penser que les Entreprises locales sont prêtes à faire face aux mesures de la ZLECAF. Cependant, le pourcentage d’Entreprise qui meurent reste bien trop élevé, les informations et les conditions relatives à l’accompagnement des Entreprises, sont très peu disponible, enfin la succession des différentes crises mondiales et internes ont participer à fragiliser encore plus l’écosystème, et obliger les pouvoirs publics et les Entreprises à repenser les stratégies développement et les mécanismes de structuration. De ce fait la capacité de la production locale à supporter l’impact de la ZLECAF sur l’économie et de fait sur la compétitivité des produits se pose avec acuité. 

Dans le but d’assurer la réussite de la mise en œuvre de la Stratégie Nationale de Développement 2030 (SND30), le gouvernement camerounais a fait de la promotion du Made in Cameroon un cheval de bataille dans la mise en œuvre de l’import substitution, et dans la valorisation de la production locale. Il est important de savoir que le « Made In » est un terme qui est employé pour indiquer le pays dans lequel est fabriqué un produit. Pour le Ministère du Commerce, le « Made in Cameroon » est une expression qui renvoie aux produits de fabrication locale, et aussi un label quel que soit le secteur d’activité. Cependant, c’est un outil qui peine à se mettre en place. Ce frein peut se justifier par : (1) la pénible structuration des chaines de valeurs par filière. (2) l’incapacité d’identifier clairement le concept Made in Cameroon. À ce jour il est impossible de définir quels sont les composantes d’un produit ou d’un service qui permettent de lui donner l’appellation « produit Made In Cameroun ». (3) la lourdeur dans la mise en œuvre de la réglementation conduisant à la labélisation et l’appellation « Made in Cameroon ». (4) le manque de structuration et de réglementation des services de normalisation, pour conduire à l’appellation « Made in Cameroon ».

Les insuffisances dans la mise en œuvre effective de cet outil, ne diminue en rien les efforts tant du secteur public que du secteur privé, à développer un « Made in Cameroon » compétitif.

La compétitivité du label « Made in Cameroon » est un gage de survie pour le commerce local, à l’ère de la ZLECAF, il permettra d’avoir une politique de soutenabilité des économies efficace et qui saura s’adapter aux mouvements conjoncturels de l’écosystème national et continental.

Face à cet enjeu, le rôle et l’implication à la fois dans la mise en œuvre des accords de la ZLECAF, et dans l’élaboration des politiques de soutenabilité de l’économie, des patronats est essentiel. Pour le cas du Cameroun, on serait attendu que le GICAM la plus grande représentation patronale aurait pris le lead de la mise en œuvre des accords de la ZLECAF, et informer les Entreprises sur les mécanismes d’application. Cela n’a pas été le cas. Cependant, le Cameroun grâce au MECAM assure le secrétariat technique du comité de mise en œuvre des accords de ZLECAF.

Le suivi et l’accompagnement du secteur privé dans la mise en œuvre des accords de la ZLECAF, participera inévitablement à construire les champions nationaux. Ce terme désigne de grandes entreprises nationales compétitives à l’international, potentiellement capables de participer au développement de leur pays d’origine et qui bénéficient d’un soutien important de la part des pouvoirs publics. Aussi le meilleur moyen de construire les champions nationaux est de suivre les PME/ les Entreprises naissantes dès leur création, les accompagner dans la structuration et croissance. Avec l’avènement de la ZLECAF, s’appuyer sur les accords qu’offre ce mécanisme pour garantir leur compétitivité sur le continent et dans le pays. 

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